MELODY SP3 Mk 2

MELODY – SP3 Mk 2

Origine : Australie / Chine
Ampli-préampli intégré à tubes
Puissance : 2 x 35 watts / 8 ohms
Bande passante : 20 Hz à 20 kHz
Distorsion : < 1%
Rapport signal / bruit : > 90 dB
2 entrées haut niveau,
3 sorties HP : 4 ohms ou 8 ohms

 

Il pourra apparaître surprenant de trouver sans ces pages le test d’écoute d’un amplificateur à tubes que d’aucun qualifierait d’amplificateur d’origine exotique ! Comme je ne m’interdis rien et que l’occasion d’en écouter un modèle s’est présentée, j’ai saisi l’occasion, et c’est de cette manière que l’intégré MELODY SP 3 dans sa version MK 2 s’est retrouvé chez moi pour quelques jours.

MELODY est une marque d’origine australienne qui fait exécuter sous cahier des charges ses produits en Chine : voilà, le décors est planté. Si le concepteur ne s’étend pas beaucoup sur la communication concernant ses produits, la première impression qui se dégage du SP 3 est très positive. En effet, cette présentation apparaît comme sobre (trop peut-être), et la réalisation est de bon ton.

La face avant ne comporte qu’un unique atténuateur faisant office de potentiomètre et trône au milieu d’une façade en aluminium épais de 25 mm d’épaisseur usiné dans la masse, au dessin profilé lui donnant un aspect sympathique et bien fini. Une diode bleue signalant le fonctionnement de l’appareil donne une touche d’élégance à l’ensemble. Pas de sélecteur de sources : celui-ci se trouve sur le flanc droit de l’appareil via un unique basculeur ne permettant d’accueillir que 2 sources haut niveau (c’est quelque peu minimaliste). Ne cherchez pas l’éventuelle sortie haut niveau : elle n’existe pas !
Le flanc gauche accueille un basculeur identique pour la mise sous tension de l’appareil. On notera que les flancs gauche et droit sont dotés de multiples orifices destinés à régler le courant des tubes (bias) permettant d’optimiser leur utilisation en fonction de leurs caractéristiques propres.

La face arrière est, elle aussi, minimaliste, puisqu’on y trouve 6 bornes HP pour le branchement des enceintes acoustiques, avec possibilité de choisir une borne en fonction de l’impédance 4 ohms ou 8 ohms. 2 prises RCA boulonnées sur le châssis accueilleront les 2 sources haut niveau, tandis que la prise IEC permettra un vaste de choix de câbles secteur. On notera que l’implantation des connecteurs modulation et HP nous laisse sous entendre que le schéma est du type double mono. Les bornes HP encapsulées autorisent les fiches bananes et les fourches.

Les circuits, les tubes, les transformateurs sont implantés au sein d’un châssis épais et ultra rigide destiné à amortir les vibrations d’origine diverses. Pour contribuer à évacuer et se prémunir de ces vibrations, le SP 3 repose sur 3 pieds en aluminium dont l’extrémité est conique, et on reconnaît alors que le concepteur s’est sérieusement penché sur la question, ce qui paraît comme surprenant….

La qualité de fabrication a tout l’air d’être conforme à ce que l’on peut attendre d’un produit de bonne gamme. Les étages de sortie sont confiés à une double paire de tubes tétrodes référence 5881, précédés de doubles triodes 12AU7 basse impédance, puis d’une double triode de type 6922. Il me semble intéressant de signaler que MELODY n’a pas hésité à utiliser des condensateurs en papier huilé. L’étage d’entrée fait appel à des triodes de type ECC 83 / 12 AX 7. A la mesure, le SP 3 a un taux de contre réaction d’une valeur assez peu élevée. On relèvera que le potentiomètre n’est pas un traditionnel modèle Alps, mais une succession de 24 résistances calibrées, dont la souplesse de réglage demeure acceptable, mais sans plus. La dernière version commercialisée adopte un potentiomètre motorisé piloté par une télécommande.

S’agissant de l’alimentation, le SP 3 embarque un gros transformateur qui inclut un enroulement haute tension, mais séparé pour chaque canal. Il est suivi d’un redressement par pont de diodes rapides et condensateurs d’origine Nichicon. Le schéma est en partie implanté sur un circuit imprimé en double verre époxy, mais une partie de celui-ci fait appel à la technique du câblage en l’air utilisant des câbles blindés en cuivre OFC argenté.

La modeste puissance de 2 x 35 watts sous 8 ohms devrait tenir ses promesses (classe AB)

Vous l’aurez compris, même au prix où il est commercialisé, le MEDOLY SP 3 est conçu et réalisé de façon saine. Mais qu’en est-il de sa musicalité ?

ECOUTE

Les tests d’écoutes ont été effectués avec un lecteur CD YBA CD 3 Classic Sigma, enceintes acoustiques PEL Kantor, et des câbles modulation et HP YBA Glass et Diamond.

CD utilisés  : Requiem de Mozart par Herbert Von Karajan – Tri Yann et l’Orchestre National des Pays de Loire – volume 2 – Doubles Jeux par Laurent Korcia – La Folia de Gregorio Paniagua – Les géants du jazz jouent Georges Brassens.

1° Timbres

Dès les premières secondes d’audition, la première chose qui attire l’attention, l’œil, et surtout l’oreille, est sans contestation le côté transparent de la restitution – nous y reviendront. Ensuite, et contrairement aux idées reçues concernant les produits à tubes, le SP 3 ne fait pas preuve de cette chaleur outrancière. Bien au contraire, même après deux heures d’utilisation, cet amplificateur intégré fait même preuve d’un peu de sécheresse. Toutefois, cette constatation ne peut être faîte de façon systématique avec tous les enregistrements. En définitive, la première qualité du SP 3 repose sur l’analyse des instruments et des voix. Il décortique remarquablement une bonne part d’infimes subtilités présentes sur un enregistrement bien réalisé.

S’agissant de la couleur des timbres, j’ai été agréablement surpris de constater que cet amplificateur permet de restituer avec une excellente justesse la couleur des instruments de musique. Sur la Folia de Gregorio Paniagua, la flûte baroque s’avère vraiment très proche de l’original, et je n’ai pas boudé mon plaisir à  »examiner les teintes sonores du clavecin, ainsi que celles de la guitare classique, ou encore celles d’un pizzicato de violon. Concernant le jeu de violon, justement, avec cet excellent enregistrement, sa restitution est à la fois douce, limpide, articulée et n’accuse aucun défaut notable : une véritable surprise qui plaide nettement en faveur de cet amplificateur. Cette entrée en matière augure de bonnes choses pour la suite. On notera que le changement de tubes d’entrée par des références 12AD7, 5751, ECC88, 5814 A, modifie de façon substantielle la tonalité et la texture des timbres, permettant de répondre aux attentes diverses – attention, ces références rendent aussi le message moins clair et limpide qu’avec les tubes d’origine.

2° Fluidité

Au chapitre de la fluidité, si le SP 3 n’est pas à classer dans la catégorie des meilleurs intégrés à tubes, il n’a pas à rougir non plus face à la concurrence tant à tubes qu’à transistors, et je n’ai pas trouvé qu’il faisait preuve de mauvaise volonté : bien au contraire. Sur l’extrait « Minor Waltz » tiré du CD Doubles Jeux par Laurent Korcia, l’enchaînement des notes, la variété des différentes tonalités s’effectuent de façon facile, spontanée, et la musique s’égraine sans dérapage, ni accroc particulièrement gênant. Sur des masses orchestrales plus chargées et plus complexes, telles que le Requiem de Mozart interprété par Karajan, on ne peut pas dire que la fluidité fasse défaut. Le SP 3 propose une musicalité organisée, certes à son rythme, mais avec une gestion saine des différents registres qui garantit un très bon « écoulement » des notes de musique. Pour pousser le bouchon un peu plus loin, quelques passages de Tri Yann et l’Orchestre National des Pays de Loire permettent de valider le bon comportement de cet amplificateur intégré en matière de fluidité. C’est également au niveau de cette liberté d’expression que l’on se surprend à savourer le côté  »respiration » et facilité d’expression qui sont à classer à l’actif de cet amplificateur.

3° Scène sonore et transparence 

Autant le dire tout de suite, la grande force du SP 3 est sans aucun doute sa transparence, qui s’appuie sur l’analyse globale et la qualité des timbres évoquée ci-avant. Sur ce thème, il faut reconnaître que MELODY marque des points. Même à niveau d’écoute intimiste, rien, mais absolument rien n’échappe à l’oreille de l’auditeur. Le SP 3 va chercher très loin, les moindres détails et les positionne dans l’espace sonore de façon à les rendre bien audible, sans les projeter en avant. Aucun voile particulier ne vient recouvrir le message sonore, y compris sur des passages orchestraux « lourds » ou chargés.
C’est un véritable plaisir que d’écouter  »Minor Waltz » de Laurent Korcia, ou les Géants du Jazz jouent Georges Brassens, car au delà de l’interprétation ou de la couleur des instruments, on entend une multitude de petits détails qui font vraiment participer l’auditeur à la prise de son. Les ingénieurs du son n’ont sans doute pas voulu gommer le bruit mécanique des touches de l’accordéon dans un cas, ou le crissement des doigts sur les cordes de la guitare, ou encore lorsqu’un musicien renifle au rythme de la musique dans l’autre cas – l’anecdote apparaît comme amusante, non ?
Sur ce point, je fais immédiatement le lien avec une donnée complémentaire concernant le détourage des instruments et des voix qui confirme la précision et les capacités d’analyse dont fait preuve cette électronique.

Concernant la scène sonore à proprement parlé, on constate que la restitution est plutôt bien campée entre les deux enceintes acoustiques. Elle est sans aucun doute moins ample qu’avec d’autres produits plus ambitieux et plus onéreux. Les effets de séparation des canaux sont à mon sens crédibles, et le centre de la scène sonore est rempli. Sur ce thème, Le SP 3, fait preuve de discernement, et on ne pas dire qu’il y ait un manque ou un excès de focalisation. Toutefois, pour les tests d’écoute, j’ai été contraint de revoir le positionnement des enceintes acoustiques.
En ce qui concèrne l’étagement des plans, il n’apparaît pas aussi bien organisé qu’avec un produit de gamme supérieure, et on peut regretter la profondeur de scène sonore n’arrive pas au niveau des meilleures électroniques du moment. En revanche, sur le plan de la hauteur de scène sonore et dans un petite pièce d’écoute, le SP 3 s’en tire honorablement. En tout état de cause, le SP 3 ne propose pas une restitution démonstrative ou holographique : il fait davantage preuve d’humilité.

4° Dynamique et réactivité  

En terme de dynamique et de réactivité, le SP 3 n’est pas mou, mais on ne peut pas dire non plus qu’il incarne la vivacité au sens premier du terme. Ce qui manque sans conteste à cet intégré se traduit par l’absence des fréquences infra graves. Oui, le SP 3 ne descend pas profondément au niveau des octaves les plus basses, comme on peut malheureusement le constater sur plusieurs extraits musicaux dont « Valéria » joué par le Modern Jazz Quartet où la contrebasse manque d’assise et de profondeur. J’ai ressenti la même frustration en écoutant le Requiem de Mozart par Karajan, où l’on aurait souhaité un meilleur détachement de l’ensemble des pupitres qui gravitent dans cette zone de fréquences inférieure à 80 Hz.

Malgré cette constatation, cet amplificateur ne se singularise pas par un manque de réactivité, il accélère fort bien et réagit normalement à toute forme de sollicitation. Si l’on prend en référence l’extrait « Valéria » interprété par le Modern Jazz Quartet, on reste sur une excellente impression quant au jeu de vibraphone parfaitement maîtrisé, ainsi que les attaques de piano franches, pleines, et d’une bonne stabilité générale. La dynamique est aussi au rendez vous, surtout si l’on considère la classe de cette électronique. Le SP 3 ne rechigne pas à emplir une pièce d’écoute de petite à moyenne dimension, et le test n’était pas gagné d’avance avec les PEL Kantor dont le rendement n’excède pas 90 dB. Les grands écarts de dynamique sont digérés avec facilité par le SP 3 qui ne s’émeut pas du tout lorsque la situation l’exige : il suit bien la partition, et tient le tempo.

5° Communication avec l’auditeur 

L’amplificateur MELODY SP 3 n’est ni extraverti, ni introverti, je dirais qu’il aborde la musique de façon simple et finalement agréable. Ses facultés à favoriser la transparence et la justesse des timbres lui permettent de revendiquer une bonne communication avec l’auditeur. Le superbe extrait « Complainte de Marion Du Faouët » de Tri-Yann Générations est restitué avec émotion, tant en ce qui concerne le vocal solo, qu’en ce qui concerne le jeu de Low whistle et la manière dont l’interprète fait vibrer l’instrument, ou encore les harmoniques de guitare acoustique – tout cela passe dans une ambiance bien sympathique, avec un aspect globalement naturel.
On aurait souhaité un peu plus de spontanéité et un surcroît de présence des interprètes dans la pièce d’écoute, mais ne soyons pas trop exigeant vis à vis de cet amplificateur qui montre ici de la bonne volonté, lui permettant de faire partager la musique sans sacrifier l’essentiel, ni faire l’impasse sur la matérialisation des instruments de musique.
J’ai pu relever une belle propension à détourer les instruments et les voix à l’écoute de « Minor Waltz » tiré du CD Doubles Jeux par Laurent Korcia, où cet amplificateur arrive à cerner de façon assez subtile la volonté de l’interprète à nous sensibiliser à son « travail » sur l’instrument, et nous transmettre sa conviction à jouer la partition. L’aspect plus consistant ou charnel des instruments de musiques acoustiques n’a pas non plus le panache procuré avec des produits de classe supérieure, mais on est loin d’être en présence d’un amplificateur qui simplifie la texture sonore, ou qui mettrait l’accent sur l’absence partielle ou totale de matérialisation des instruments de musique.

Conclusion  :

Au final que penser de l’amplificateur intégré MELODY SP 3 ? – Il a des défauts, c’est entendu : son manque de grave ne lui permettra sans doute pas de se placer dans la cour des grands. En revanche, le SP 3 a aussi des qualités qui le rendent attachant, comme sa très belle transparence et sa fluidité. Le propriétaire de l’amplificateur mis à ma disposition émet quelques réserves sur sa fiabilité à long terme, car il s’avère que certains composants électroniques (hors tubes) accusent désormais quelques faiblesses…. Malgré les quelques défauts objectifs constatés au long de ce compte rendu d’écoute d’un vingtaine d’heure, je vais en surprendre plus d’un, car le MELODY SP 3 a pourtant quelque chose d’attachant. Pour son prix, il tient ses promesses, si l’on évoque la justesse de ses timbres et une bonne transparence d’ensemble. Ainsi, je suis certain qu’il pourra répondre aux attentes de tous ceux qui recherchent une forme de restitution assez authentique.

Cotations :Musicalité : 7 / 10
Rapport qualité – prix : 7 / 10

 

Prix : 1400 € ( 10/2011) avec télécommande.


Test d’écoute réalisé par
Lionel Schmitt